La venue des Elfes et la Construction de Kôr
Meril poursuivit son récit. Au terme du troisième âge de la captivité de Melkor, Manwë contempla le monde du haut du Taniquetil et entendit des bruits de pas. Réalisant que les Eldar s’étaient éveillés, il en fit part à Varda qui chanta, tant sa joie était grande. Informant à son tour Aulë, elle prit de la lumière de Telimpë, avec laquelle il travaillait, puis plaça des étoiles dans le ciel.
De son côté, Oromë vint en hâte à Valinor et annonça la nouvelle aux autres Dieux. Il raconta que dans les forêts de Palisor, il avait vu toute une foule chanter et danser sous les étoiles.
Manwë tint conseil avec tous les Valar, y compris Melkor, qui conserva cependant ses liens. Ceux-ci souhaitèrent que quelques Eldar viennent à Valinor afin de s’entretenir avec Manwë. Nornorë, prompt comme l’éclair, se rendit à Palisor et rapporta la parole des Valar aux Eldar. Trois Elfes s’avancèrent : Isil Inwë (futur chef des Teleri), Finwë Nolemë, (qui plus tard prit la tête des Noldoli), et Tinwë Lintö (chef à venir des Elfes d’Hisilomë). Ces trois Elfes se présentèrent devant les Valar et Manwë leur demanda comment ils étaient venus. A la réponse des Eldar, chacun comprit qu’Ilúvatar avait effacé tout souvenir de la mémoire des Premiers-Nés. Palùrien se leva en disant que des êtres aussi beaux ne sauraient demeurer sur les sombres terres et exprima son désir de voir les Eldar demeurer auprès d’eux en Valinor. Tous les Dieux, sauf Makar, parlèrent en sa faveur. Manwë proposa donc aux représentants Eldar d’amener leur peuple à Valinor et ils s’en réjouirent.
Sachant que les Eldar seraient nombreux, les Valar entreprirent de préparer leur venue. Aulë rassembla tous ses outils. Palùrien et Tuivana parcoururent les terres pour leur trouver un logis. Ulmo, quant à lui, déplaça une île qui appartenait à Ossë sans lui demander son avis, et l’amena jusqu’aux rives d’Hisilomë. Les Teleri se mirent en marche aux côtés d’Oromë et arrivèrent pour embarquer sur l’île. Au grand déplaisir de ces derniers, Ulmo les amena jusqu’à Valinor sans attendre les Noldoli et les Solosimpi. Ulmo retira l’île une seconde fois vers Hisilomë afin de prendre les Noldoli, tandis que les Solosimpi, égarés, cherchaient leur chef. Le cor d’Oromë retentit, permettant aux Solosimpi de retrouver leur chemin. Ils furent ainsi menés au bord de la mer. Ils attendirent longtemps Ulmo : celui-ci fut en effet contraint de faire de nombreux détours car Ossë, furieux qu’il ait pris son île sans sa permission déclencha des tempêtes sur son chemin.
Les Solosimpi finirent par embarquer, mais au beau milieu de leur traversée, Ossë et les Oarni attaquèrent l’île et l’enracinèrent dans le fond de la mer. Elle prit dès lors le nom d’Ile Solitaire. Première demeure des Solosimpi, elle fut également la cause de leur changement de langage et d’usages. Ils fabriquèrent des flûtes et toutes sortes d’objets avec leurs coquillages. L‘amour de la mer les envahit, bien qu’ils se languissent encore de Valinor.
Dans l’intervalle, les Noldoli et les Teleri construisirent leurs demeures. Manwë enseigna aux Teleri la chanson et la poésie et Aulë transmit son savoir aux Noldoli. Il y avait au sud une colline solitaire où les Elfes songèrent à habiter. Les Dieux la nommèrent Kôr. Aulë rassembla au pied de cette colline de la poussière d’or et d’argent et sur son sommet, les Elfes construisirent une grande tour. Des arbres croissaient sur les murs de la cité et les Valar firent don à Inwë et à Nolemë de chacune de leurs pousses.
Pendant ce temps, les Solosimpi demeuraient toujours sur l’Ile Solitaire. Ossë qui n’avait toujours pas pardonné à Ulmo, apprit aux oiseaux, qui un jour vinrent des jardins de Palùrien, comment voler. Il les logea dans les falaises des bords de mer au grand dam d’Ulmo, car ils mangeaient ses poissons.
Cependant, les Teleri et les Noldoli étaient tristes car ils n’avaient toujours pas retrouvé les Solosimpi. Ulmo pouvait les ramener avec l’aide d’Ossë mais il ne voulut pas s’abaisser à cela. Aulë, Ulmo et Oromë allèrent donc sur l’Ile Solitaire et construisirent des bateaux en forme de cygnes avec l’aide des oiseaux d’Ossë. Tous les Solosimpi embarquèrent. Les oiseaux les suivirent et les aidèrent à naviguer, ce qui chagrina Ossë car ils avaient causé sa perte. Lorsque les Solosimpi arrivèrent, les Teleri et les Noldoli leur réservèrent un chaleureux accueil.
Les Solosimpi ne demeurèrent pas à Kôr mais dans les rochers de la côte. Ulmo s’assit au milieu d’eux et leur enseigna sa science. Ils jouaient de la musique reprenant le bruit des vagues. Les Teleri, eux, jouèrent pour les Valar. Les Noldoli se joignirent souvent à eux et se firent aimer par Salmar et Aulë. Ils peignèrent et sculptèrent si bien que Valmar devint encore plus belle sous leurs yeux.
Les Noldoli instruits par Aulë œuvraient en secret avec des joyaux que les Dieux leur avaient donnés et des perles des Solosimpi : ce fut ainsi qu’ils façonnèrent les premières gemmes. Ils fabriquèrent aussi des cristaux, des chrysophales, des topazes, des grenats, des émeraudes, des saphirs, des améthystes, des pierres de lune, des béryls, de l’onyx et des agates. Fëanor se rendit chez les Solosimpi et ils lui donnèrent leurs plus grosses perles de même qu’une urne remplie de lumière phosphorescente. Il utilisa plusieurs autres gemmes et y mêla la lumière de Silpion et de Laurelin, créant ainsi trois joyaux qui brillaient par eux-mêmes. Il les nomma Silmarilli et ils illuminèrent Kôr.
Le peuple des Eldar était dans sa plus grande gloire et jamais la lumière de Valinor ne fut aussi belle. Seul Ossë n’y demeurait pas. Il vivait au milieu des joyaux abandonnés par les Solosimpi, parmi les rochers d’Eldamar et ses palais restèrent longtemps vides.
A la fin de son récit, Meril invita Eriol à retourner d’où il venait, ce qu’il fit après qu’elle lui ait dit avoir rallongé ce conte par amour pour ces jours bienheureux.
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