Les cinq Hobbits se levèrent très tôt le lendemain, et à six heures, se tinrent prêts à partir. Après avoir fait leurs adieux à Gros Bolger, Merry, Pippin, Sam et Frodon pénétrèrent dans la Vieille Forêt. Merry leur confirma à quel point elle était étrange. Jadis en effet, les arbres avaient attaqué la haie marquant la frontière de la Comté. Les Hobbits les avaient dissuadés de recommencer grâce à un grand feu de joie, ce qui eut pour effet de rendre les arbres encore plus hostiles.
Certes, à mesure que les quatre amis progressaient sous bois, rien ne bougeait ou ne se faisait entendre, mais cela ne les empêcha pas de se sentir épiés et comme étouffés. Ils avaient également l’impression que les arbres faisaient en sorte de leur barrer le passage. Ils furent soulagés en arrivant à la Clairière du Feu de Joie, car ils y revirent enfin le ciel bleu. Cependant la suite de leur voyage n’en fut que plus oppressante.
Merry les mit en garde contre la vallée du Tournesaules, réputée comme étant la zone la plus étrange de la Vieille Forêt. Ils ne devaient en aucun cas se diriger vers cet endroit, mais s’aperçurent que le sentier qu’ils suivaient les y menait inéluctablement. Ils le quittèrent donc, ce qui leur parut tout d’abord être un bon choix. Pourtant, les arbres ne cessèrent de se resserrer, rendant leur marche très difficile jusqu’à ce que finalement, ils atteignent la vallée du Tournesaules. Là, une étrange torpeur s’empara du groupe.
Merry et Pippin s’affaissèrent contre un saule et s’endormirent. Frodon, quant à lui, fut pris d’une irrésistible envie de se baigner les pieds, ce qu’il fit dans un état second avant de s’endormir à son tour. Sam parvint à rester éveillé et partit à la recherche des poneys, lorsque soudain, il entendit un bruit.
Il se précipita et vit que Frodon était tombé dans la rivière et qu’il ne pouvait plus remonter à la surface, car une grosse racine lui maintenait la tête sous l’eau. Il le sortit de là tant bien que mal, puis tous deux se tournèrent vers le saule. Pippin avait disparu à l’intérieur du tronc, tandis que le haut du corps de Merry était coincé dans l’arbre. Ils entreprirent de faire du feu afin de libérer Merry et Pippin, mais le saule menaça de tuer leurs amis s’ils ne l’éteignaient pas immédiatement.
Désespéré, Frodon se mit à appeler à l’aide, et il lui sembla que quelqu’un lui répondait. Il tendit l’oreille et un chant lui parvint de plus en plus distinctement. Tandis que Sam et lui redoublaient d’appels au secours, un homme âgé, vêtu de bleu, apparut sur le sentier. Il se nommait Tom Bombadil et après les avoir rassurés, pesta contre le vieil Homme-Saule, qui n’en était pas à son coup d’essai. C’était en effet l’arbre le plus malsain de la Vieille Forêt. Après avoir sorti les deux infortunés Hobbits de leur trou, Tom Bombadil convia en riant les amis chez lui. C’était assurément un être joyeux, qui ne cessait de chanter. Ils arrivèrent à sa maison, et là, furent accueillis par une voix de femme jeune et claire: c’était celle de Baie d’Or, la fille de la Rivière, compagne de Tom Bombadil.